vendredi 14 janvier 2011

Que penser de l'affaire Zemmour?

«Il suffit, comme j’ai eu l’occasion de le faire, de consulter les listings de la Direction centrale de la Sécurité publique du ministère de l’Intérieur, pour constater que plus de 50% des infractions constatées sont imputables à des jeunes dont le patronyme est de consonance africaine ou maghrébine» déclare Chevènement, dans un courrier du 3 janvier 2011 adressé à la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, où a débuté le 11 janvier 2011 le procès d'Eric Zemmour, cité en justice pour diffamation et provocation à la haine raciale par SOS Racisme, la Licra, le Mrap, l’UEJF et J’accuse.


Références

- Bernard Debré juge le procès Zemmour "scandaleux", lejdd.fr, 14 janvier 2011

- Eric Zemmour au tribunal comme à la télé, Par Kévin Le Louargant, 14/01/2011

- Eric Nolleau: «Si je devais attaquer Zemmour à chaque fois que je suis en désaccord avec lui», Libération, 13 janvier 2011

- Zemmour et Dieudonné n'ont rien à faire devant un juge, Hugues Serraf, slate.fr, 14 janvier 2011

- «Trafiquants noirs et arabes»: quand Chevènement défend Zemmour, Libération.fr, 12 janvier 2011

- Eric Zemmour: «Mes propos sont brutaux, mais la réalité est brutale», Libération.fr, 12 janvier 2011

La dépression nerveuse française

Références

- La France, société du spectacle triste, Eric Le Boucher, 12 janvier 2011

Faut-il s'indigner ou s'engager?

Références

- Lettre ouverte à Stéphane Hessel, Bruno de Verdelhan, lecteur du Monde, 14 janvier 2011

- Faut-il toujours s'indigner ?, par Alain Pierret, Le Monde, 14 janvier 2011

- Indignez-vous si vous voulez, mais..., Eric Le Boucher, slate.fr, 8 janvier 2011

- Stéphane Hessel s'attaque à des moulins à vent, Eric Le Boucher, slate.fr, 30 décembre 2010

- Indignez-vous!, l'esprit de Résistance de Stéphane Hessel, Philippe Boggio, 16 décembre 2010

mercredi 12 janvier 2011

L'affaire du Mediator

Références

- Le Mediator, une bombe à fragmentation, Jean-Yves Nau, 13 janvier 2011

- Mediator: une histoire française?, Du grain à moudre, France-Culture, 02.12.2010 - 18:20

mardi 4 janvier 2011

Non, le peuple n’est pas une masse brutale et ignorante

Par JACQUES RANCIÈRE Philosophe, Libération, 3 janvier 2011

Il ne se passe pas de jour où l’on n’entende dénoncer les risques du populisme. Il n’est pas pour autant facile de saisir ce que le mot désigne. Qu’est-ce qu’un populiste ? A travers tous les flottements du mot, le discours dominant semble le caractériser par trois traits essentiels : un style d’interlocution qui s’adresse directement au peuple par-delà ses représentants et ses notables ; l’affirmation que gouvernements et élites dirigeantes se soucient de leurs propres intérêts plus que de la chose publique ; une rhétorique identitaire qui exprime la crainte et le rejet des étrangers.

Il est clair pourtant qu’aucune nécessité ne lie ces trois traits. Qu’il existe une entité appelée peuple qui est la source du pouvoir et l’interlocuteur prioritaire du discours politique, c’est la conviction qui animait les orateurs républicains et socialistes d’antan. Il ne s’y lie aucune forme de sentiment raciste ou xénophobe. Que nos politiciens pensent à leur carrière plus qu’à l’avenir de leurs concitoyens et que nos gouvernants vivent en symbiose avec les représentants des grands intérêts financiers, il n’est besoin d’aucun démagogue pour le proclamer. La même presse qui dénonce les dérives «populistes» nous en fournit jour après jour les témoignages les plus détaillés. De leur côté, les chefs d’Etat et de gouvernement dits «populistes», comme Silvio Berlusconi ou Nicolas Sarkozy, se gardent bien de propager l’idée «populiste» que les élites sont corrompues. Le terme «populisme» ne sert pas à caractériser une force politique définie. Il ne désigne pas une idéologie ni même un style politique cohérent. Il sert simplement à dessiner l’image d’un certain peuple.

Car «le peuple» n’existe pas. Ce qui existe ce sont des figures diverses, voire antagoniques du peuple, des figures construites en privilégiant certains modes de rassemblement, certains traits distinctifs, certaines capacités ou incapacités. La notion de populisme construit un peuple caractérisé par l’alliage redoutable d’une capacité - la puissance brute du grand nombre - et d’une incapacité - l’ignorance attribuée à ce même grand nombre. Pour cela, le troisième trait, le racisme, est essentiel. Il s’agit de montrer à des démocrates toujours suspects d’«angélisme», ce qu’est en vérité le peuple profond : une meute habitée par une pulsion primaire de rejet qui vise en même temps les gouvernants qu’elle déclare traîtres, faute de comprendre la complexité des mécanismes politiques, et les étrangers qu’elle redoute par attachement atavique à un cadre de vie menacé par l’évolution démographique, économique et sociale. La notion de populisme remet en scène une image du peuple élaborée à la fin du XIXe siècle par des penseurs comme Hippolyte Taine et Gustave Le Bon, effrayés par la Commune de Paris et la montée du mouvement ouvrier : celle des foules ignorantes impressionnées par les mots sonores des «meneurs» et menées aux violences extrêmes par la circulation de rumeurs incontrôlées et de frayeurs contagieuses.

Ces déchaînements épidémiques de foules aveugles entraînées par des leaders charismatiques sont-ils vraiment à l’ordre du jour chez nous ? Quels que soient les griefs exprimés tous les jours à l’égard des immigrés et notamment des «jeunes des banlieues», ils ne se traduisent pas en manifestations populaires de masse. Ce qu’on appelle racisme aujourd’hui dans notre pays est essentiellement la conjonction de deux choses. Ce sont d’abord des formes de discrimination à l’embauche ou au logement qui s’exercent parfaitement dans des bureaux aseptisés. Ce sont ensuite des mesures d’Etat dont aucune n’a été la conséquence de mouvements de masse : restrictions à l’entrée du territoire, refus de donner des papiers à des gens qui travaillent, cotisent et paient des impôts en France depuis des années, restriction du droit du sol, double peine, lois contre le foulard et la burqa, taux imposés de reconduites à la frontière ou de démantèlements de campements de nomades. Ces mesures ont pour but essentiel de précariser une partie de la population quant à ses droits de travailleurs ou de citoyens, de constituer une population de travailleurs qui peuvent toujours être renvoyés chez eux et de Français qui ne sont pas assurés de le rester.

Ces mesures sont appuyées par une campagne idéologique, justifiant cette diminution de droits par l’évidence d’une non-appartenance aux traits caractérisant l’identité nationale. Mais ce ne sont pas les «populistes» du Front national qui ont déclenché cette campagne. Ce sont des intellectuels, de gauche dit-on, qui ont trouvé l’argument imparable : ces gens-là ne sont pas vraiment français puisqu’ils ne sont pas laïques.

Le récent «dérapage» de Marine Le Pen est à cet égard instructif. Il ne fait en effet que condenser en une image concrète une séquence discursive (musulman = islamiste = nazi) qui traîne un peu partout dans la prose dite républicaine. L’extrême droite «populiste» n’exprime pas une passion xénophobe spécifique émanant des profondeurs du corps populaire ; elle est un satellite qui monnaye à son profit les stratégies d’Etat et les campagnes intellectuelles distinguées. L’Etat entretient le sentiment permanent d’une insécurité qui mêle les risques de la crise et du chômage à ceux du verglas ou du formamide pour faire culminer le tout dans la menace suprême de l’islamiste terroriste. L’extrême droite met les couleurs de la chair et du sang sur le portrait standard dessiné par les mesures ministérielles et la prose des idéologues.

Ainsi ni les «populistes» ni le peuple mis en scène par les dénonciations rituelles du populisme ne répondent-ils vraiment à leur définition. Mais peu importe à ceux qui en agitent le fantôme. L’essentiel, pour eux, est d’amalgamer l’idée même du peuple démocratique à l’image de la foule dangereuse. Et d’en tirer la conclusion que nous devons nous en remettre à ceux qui nous gouvernent et que toute contestation de leur légitimité et de leur intégrité est la porte ouverte aux totalitarismes. «Mieux vaut une république bananière qu’une France fasciste», disait un des plus sinistres slogans antilepénistes d’avril 2002. Le battage actuel sur les dangers mortels du populisme vise à fonder en théorie l’idée que nous n’avons pas d’autre choix.

Qu'est ce que le populisme?

 Selon Wikipedia, le populisme désigne un type de discours et de courants politiques, critiquant les élites et prônant le recours au peuple (d’où son nom), s’incarnant dans une figure charismatique et soutenu par un parti acquis à ce corpus idéologique. Il suppose l'existence d'une démocratie représentative qu’il critique. C'est pourquoi ses manifestations ont réapparu avec l'émergence des démocraties modernes, après avoir connu selon certains historiens une première existence sous la République romaine.

Selon Annie Collovald8, le mot populisme connaît un nouveau succès depuis les années 1980, comme synonyme de démagogie ou d'opportunisme politique, surtout lorsqu'il s'agit de mouvements d'opposition.

Selon cette universitaire en sciences politiques, la catégorie renseignerait moins sur ceux qu'elle désigne que sur ceux qui l'emploient.

Annie Collovald met en parallèle le succès du vocable avec la disparition progressive des classes populaires dans les appareils et dans les discours des partis politiques et interprète l'usage croissant du mot populisme ou populiste comme l'expression d'une méfiance grandissante à l'égard des classes populaires et d'un penchant nouveau pour la démocratie capacitaire voire censitaire. En effet, le populisme a depuis cette époque souvent été identifié à l'extrême-droite.

Pourtant, comme le souligne l'historien Michel Winock, le populisme n'est pas spécifiquement d'extrême droite. Le mot désigne une confiance dans le peuple que l'on rencontre dans les discours de Robespierre ou les écrits de Michelet9. ».

Le terme populisme reste néanmoins très flou dans son utilisation, et son sens peut varier selon le contexte du discours. Souvent proche de la démagogie, il peut ainsi dénoncer les personnes qui cherchent à mobiliser le peuple par des promesses électoralistes, en exacerbant ses frustrations et en réveillant parfois les préjugés populaires tels que le nationalisme, la xénophobie, le racisme ou en justifiant les réflexes sécuritaires.

Populisme

Le terme populisme est souvent utilisé dans un sens péjoratif par les classes dirigeantes ou les politiciens au pouvoir pour critiquer l'opposition à leur politique.

Liens

- Manuel Valls «marche sur la corde raide du populisme», accuse Eva Joly, Libération, 22 août 2013

- Non, le peuple n’est pas une masse brutale et ignorante, Par JACQUES RANCIÈRE Philosophe, Libération, 3 janvier 2011

- Erwan Sommerer, L'épochè populiste - Dialogue avec une fiction philosophique: le populiste et le démocrate; la suspension populiste du jugement; le peuple contre le concept de peuple; le dialogue avec le réel. In Le Portique [En ligne], 2-2006. Consulté le 20 mars 2012.

- Patrick Sébastien : « Populiste, pour moi, c'est pas péjoratif » , Par Augustin Scalbert | Rue89 | 10/04/2010


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- Wikipedia

Ouvrages

  • Daniele Albertazzi et Duncan McDonnell, Twenty-First Century Populism: The Spectre of Western European Democracy, Londres : Palgrave Macmillan, 2007.
  • Thierry Bouclier, Les Années Poujade, Editions Remi Perrin, 2006.
  • Annie Collovald, Le « Populisme du FN » : un dangereux contresens, Éditions du Croquant, 2004 (ISBN 2-914968-06-X)
  • Laurent François, Populisme d'Europe, Lyon : Institut d'Études Politiques, 2006. (en ligne)
  • Stuart Hall, Le Populisme autoritaire. Puissance de la droite et impuissance de la gauche au temps du thatchérisme et du blairisme, trad. de Christophe Jaquet, Paris, Éditions Amsterdam, Paris, 2008 (ISBN 978-2915547658).
  • Ernesto Laclau, La Raison populiste, trad. Jean-Pierre Ricard, Paris, Seuil, 2008 (ISBN 978-2020884211).
  • Christopher Lasch, "Le Seul et vrai Paradis", Champs/Flammarion , 2002 ; "La Révolte des élites et la trahison de la démocratie", Climats, 1996.
  • Dominique Reynié, Populismes : la pente fatale, Paris, Plon, 2011, 280 pages
  • Jean-Pierre Rioux (directeur). Les Populismes. Collection Tempus. Paris : Perrin, 2007 (ISBN 978-2262026134)
  • Pierre-André Taguieff, L'Illusion populiste : essai sur les démagogies de l'âge démocratique, Flammarion, 2007.
  • Jérôme Vidal, « Les « temps nouveaux », le populisme autoritaire et l'avenir de la gauche. À propos de Le Populisme autoritaire de Stuart Hall », in La Revue internationale des livres et des idées, n° 5, mai-juin 2008 (en ligne).

- Mathew Crawford

https://fr.wikipedia.org/wiki/Matthew_Crawford

https://www.franceculture.fr/emissions/les-chemins-de-la-philosophie/trump-dans-loeil-des-philosophes-44-la-revolution-peut-elle-etre-menee-par-lelite